Un point sur le Congé pour Invalidité Temporaire Imputable au Service (CITIS) dans la Fonction Publique.

Par Me Pauline BREDON, Avocat au Barreau de Clermont-Ferrand, LKJ AVOCATS

L’attente fut longue. Plus de 3 ans après l’entrée en vigueur de l’article 10 de l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 créant le congé pour invalidité temporaire imputable au service, le décret d’application pour la fonction publique hospitalière est enfin paru le 15 mai 2020 au journal officiel (décret n°2020-566 du 13 mai 2020).

A cette occasion, il convient de faire le point sur les principaux apports de ce nouveau régime juridique dont sont désormais dotés les 3 fonctions publiques (décret n°2019-122 du 21 février 2019 pour l’Etat et n°2019-301 du 10 avril 2019 pour la territoriale).

Le régime du CITIS instaure en effet de nouvelles démarches impliquant différents acteurs et de nouveaux délais, tant pour l’agent que pour l’administration. Il consacre également un régime de présomption d’imputabilité au service.

1-  Risques couverts par le CITIS et présomption d’imputabilité au service

La loi prévoit que le CITIS est la position administrative unique sous laquelle sont placés les fonctionnaires titulaires et stagiaires relevant du régime spécial de sécurité sociale, victimes d’un accident de service, de trajet, ou d’une maladie imputable au service.

Il n’est pas applicable au régime de réparation de l’incapacité permanente ni aux maladies à causes exceptionnelles (par exemple contractées ou aggravées à l’occasion d’un acte de dévouement dans un intérêt public ou en exposant ses jours pour sauver la vie d’une ou plusieurs personnes).

L’un des apports novateurs du CITIS est la mise en place du principe de présomption d’imputabilité au service :

–        pour les accidents de service (il s’agit ici d’une consécration légale, la jurisprudence ayant reconnu ce principe depuis de nombreuses années voir par exemple arrêt du Conseil d’Etat du 15 juin 2012, n°348258)

–        pour les maladies professionnelles mentionnées aux tableaux figurant à l’article L 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et qui sont contractées dans les conditions mentionnées auxdits tableaux.

Les accidents de trajet et les autres maladies imputables au service sont exclus du principe de présomption d’imputabilité.

Le législateur, animé par une volonté de mieux protéger les droits aux congés des agents, a fixé le cadre juridique des risques professionnels pouvant faire l’objet d’un CITIS.

Pour autant, force est de constater que c’est encore la jurisprudence qui est venue apporter des précisions quant aux définitions des risques couverts par le CITIS.

Par exemple, selon le Conseil d’Etat : « une maladie contractée par un fonctionnaire ou son aggravation doivent être regardées comme imputables au service si elles présentent un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail  de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service » ( CE 13 mars 2019, n°407795).

2-  Les nouveaux délais dont dispose l’agent pour établir la demande de CITIS

Avant la création du CITIS, la demande de congé n’était encadrée par aucun délai.

Dès lors, dans les trois fonctions publiques la demande de CITIS, constituée d’un formulaire et du certificat médical, est désormais soumise à des délais stricts. Cela implique donc une vigilance toute particulière pour en adresser la demande.

Ø    Ainsi, dans le cadre d’un accident de service ou d’un accident de trajet, l’agent doit adresser sa demande dans les 15 jours à compter de la date de l’accident, sauf dans l’hypothèse de lésions tardives où il  peut, à titre dérogatoire, adresser sa demande de CITIS dans les 15 jours à compter de la constatation médicale de l’accident, à condition que cette constatation intervienne dans les 2 ans suivant l’accident.

Ø   Dans le cadre d’une maladie imputable au service, l’agent dispose d’un délai de 2 ans pour adresser sa demande de CITIS à compter de la date de la première constatation médicale de la maladie ou de la date du certificat médical démontrant le lien possible entre la maladie et l’activité professionnelle.

L’agent peut également former une demande de CITIS à titre dérogatoire dans un délai de 2 ans à compter de la modification des tableaux de maladies professionnelles.

Le respect des délais susmentionnés est primordial, puisqu’à défaut les textes prévoient que la demande de l’agent sera purement et simplement rejetée par l’administration.

Toutefois, ces délais ne sont pas applicables lorsque :

–         le fonctionnaire est victime d’un acte de terrorisme, blessé ou impliqué lors de cet acte dans les conditions prévues aux articles L169-1 et suivants du code de la sécurité sociale,

–        s’il justifie d’un cas de force majeure, d’une impossibilité absolue d’agir ou d’un motif légitime.

 

3-    Les nouveaux délais dont dispose l’administration pour se prononcer sur la demande de l’agent

Si l’agent est soumis à des délais quant à la formation de sa demande sous CITIS, il n’en demeure pas moins que l’administration est également soumise à des délais stricts pour instruire la demande et rendre sa décision.

Ø  Dans le cadre d’un accident, l’administration dispose d’un délai d’un mois à réception de la demande de CITIS pour se prononcer.

Ø  Dans le cadre d’une maladie professionnelle, l’administration dispose d’un délai de 2 mois à réception de la demande de CITIS pour se prononcer.

Si une enquête administrative ou une expertise médicale sont diligentées ou si la commission de réforme est saisie, lesdits délais sont prorogés d’un délai supplémentaire de 3 mois.

Faute de respecter ces délais, l’administration doit placer son agent en CITIS à titre provisoire pour la durée d’incapacité de travail indiquée sur le certificat médical initial ou de prolongation.

Outre ces nouvelles dispositions tenant aux délais, le CITIS a mis en place des mécanismes d’instruction des dossiers modifiant le rôle de certains acteurs tels que le médecin de prévention (ou du travail) ou encore la commission de réforme.

Il instaure également une obligation pour l’administration de faire procéder à une visite de contrôle une fois par an au-delà de 6 mois de prolongation du congé initialement accordé.

Bien entendu d’autres points de ce nouveau régime méritent d’être commentés et feront l’objet de prochaines publications.

A noter que devant la multiplicité des cas particuliers d’accidents et de maladies professionnelles du fait de la diversité des activités professionnelles issues de la fonction publique, la jurisprudence administrative établit « un droit public social » au fur et à mesure des décisions rendues, ce qui implique un suivi régulier de l’actualité législative et jurisprudentielle dans ce contexte de réforme de la fonction publique.

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