Publié le 03 février 2017
LA NOUVELLE PROCÉDURE DE CHANGEMENT DE PRÉNOM
Par Cabinet Groupé Avocats 63
Avocats au Barreau de Clermont-Ferrand, avec la Collaboration de Mlle Ambre SERRE, Assistante.
Dans le cadre de la loi « modernisation de la justice du XXIème siècle » du 18 novembre 2016, la procédure de changement de prénom a été modifiée.
Avant cette loi, le requérant devait saisir le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de son lieu de naissance ou de son domicile, assisté de son avocat.
Le législateur a décidé de dé-judiciariser la procédure afin de désengorger les tribunaux, estimant que pour bon nombre de dossiers il n’y avait aucun inconvénient à apporter un tel changement.
La réforme prévue par la loi 18 novembre 2016 prévoit donc qu’il ne sera plus nécessaire de se rendre au tribunal pour obtenir un changement de son prénom.
Nouvelle procédure d’action en changement de prénom
Depuis le 19 novembre 2016, toute personne souhaitant changer de prénom, supprimer, ou modifier l’ordre de ses prénoms, doit en faire la demande auprès de l’officier d’état civil de la mairie de son lieu de naissance, ou de son lieu de résidence actuelle comme le prévoit l’article 60 du Code civil :
« Toute personne peut demander à l’officier de l’état civil à changer de prénom. La demande est remise à l’officier de l’état civil du lieu de résidence ou du lieu où l’acte de naissance a été dressé. S’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur en tutelle, la demande est remise par son représentant légal. L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut également être demandée. »
Ce même article précise que si la personne souhaitant apporter une modification à son prénom est mineure, la demande devra être faite par son représentant légal.
Si la personne mineure est âgée de 13 ans ou plus, elle devra donner son consentement.
Le représentant légal d’un requérant sous tutelle, devra également en faire la demande pour lui.
« Toute personne peut demander à l’officier de l’état civil à changer de prénom. La demande est remise à l’officier de l’état civil du lieu de résidence ou du lieu où l’acte de naissance a été dressé. S’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur en tutelle, la demande est remise par son représentant légal. L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut également être demandée.
Si l’enfant est âgé de plus de treize ans, son consentement personnel est requis. »
Il appartiendra à l’officier d’état civil de juger si la demande de modification n’est pas contraire à l’intérêt de l’enfant, du requérant, ou aux droits des tiers.
Si cette condition fait défaut, l’officier d’état civil a pour obligation d’en informer le Procureur de la République. Si le Procureur s’oppose au changement, le demandeur pourra alors saisir le Juge aux Affaires Familiales.
L’article 60 du Code civil énonce :« S’il estime que la demande ne revêt pas un intérêt légitime, en particulier lorsqu’elle est contraire à l’intérêt de l’enfant ou aux droits des tiers à voir protéger leur nom de famille, l’officier de l’état civil saisit sans délai le procureur de la République. Il en informe le demandeur. Si le procureur de la République s’oppose à ce changement, le demandeur, ou son représentant légal, peut alors saisir le juge aux affaires familiales. »
La condition essentielle pour modifier son prénom : justifier d’un intérêt légitime
Comme auparavant, pour qu’un changement de prénom soit possible, il faut que le requérant, ou son représentants légal, justifie d’un intérêt légitime à solliciter cette modification.
La jurisprudence reste celle en vigueur, et considère qu’un intérêt légitime est notamment constitué :
- Lorsque le prénom est ridicule ou lorsque l’association du prénom et du nom est ridicule,
- Lorsqu’un autre prénom est utilisé dans la vie courante,
- En cas de transsexualisme,
- Lorsque le prénom a une consonance étrangère et que le requérant souhaite que son prénom soit francisé,
- Pour motif religieux, lorsque le prénom fait obstacle à la pratique d’un culte.
Cette liste n’est pas limitative, l’officier d’état civil pouvant estimer par exemple, qu’il y a un intérêt légitime lorsque le prénom lui apparaît fantaisiste.
Pour les dossiers dans lesquels l’intérêt légitime n’est pas flagrant et appelle une discussion, le Juge aux Affaires Familiales reste compétent in fine, l’officier d’état civil n’étant finalement qu’un filtre permettant aux demandes manifestement fondées d’aboutir directement à un changement de prénom.
L’article 61-4 du Code civil précise : « Mention des décisions de changement de prénoms et de nom est portée en marge des actes de l’état civil de l’intéressé et, le cas échéant, de ceux de son conjoint, de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité et de ses enfants.
De même, les décisions de changement de prénoms et de nom régulièrement acquises à l’étranger sont portées en marge des actes de l’état civil sur instructions du procureur de la République […]. »
Lorsque la modification est acceptée par l’officier d’état civil, ou validée par le Procureur de la République, ou que la décision rendue par le Juge aux Affaires Familiales est favorable, la modification sera inscrite à l’état-civil du demandeur et sur les actes d’état-civil des personnes ayant un lien juridique avec lui.
Nous n’avons actuellement encore pas assez le recul nécessaire pour analyser quel sera l’impact réel de cette modification.
Il n’est cependant pas certain que cette simplification ait l’effet désiré par le législateur :
- Soit l’officier d’état civil aura une politique extrêmement ferme et restrictive de l’appréciation de l’intérêt légitime, et la juridiction sera en tout état de cause saisie, n’étant pas certain que les parquets aient les moyens supplémentaires pour procéder à des analyses approfondies des cas soumis.
- Soit l’officier d’état civil aura une politique très libérale de changement de prénom, au risque d’affaiblir encore le principe d’immutabilité de l’état des personnes.
A notre sens les risques majeurs sont d’une part la multiplication de demandes à l’intérêt douteux, d’autre part la très grande disparité des traitements des situations selon le service d’état-civil compétent.
Le filtre de l’avocat et du Juge aux Affaires Familiales spécialement formés aux considérations juridiques ou jurisprudentielles mais aussi à reconnaître et apprécier les circonstances particulières de la vie et de l’affect personnel des requérants garantissait du moins un certain équilibre.
Quoiqu’il en soit, il n’est pas interdit de consulter son avocat avant d’entamer toute démarche.
Celui-ci appréciera la pertinence du changement demandé et le cas échéant pourra aider le requérant à formuler sa demande auprès de l’officier d’état-civil.